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Je n'ai rien dit quand...

C'était une veille d'école, un dimanche plus précisément, j'étais sous ma couverture et je commençais à m'endormir quand soudain, je me sentis mal, très mal. Je ne pouvais le dire à ma mère car la douleur passa aussitôt et que je me sentais un peu bête de me plaindre de quelque chose qui n'existait plus. Je n'ai rien dit quand elle est venue pour me dire bonne nuit. Je préférai rester dans le silence et le déni. 

Je n'ai rien dit quand on me posa des questions. Je n'ai rien dit quand ces personnes essayèrent de me parler sans arrêt. Je n'ai rien dit quand on m'a insulté, quand j'ai bloqué une personne par haine. Je n'ai rien dit quand nos regards se croisaient et qu'une vague de haine prenait le dessus sur moi. Je n'ai rien dit quand cette personne a déformé mes propos pour arriver à ses fins, quand elle m'a affiché jusqu'à ce jour. Je n'ai rien dit quand une personne m'a avoué ses plus sombres activités. Je ne dis rien car la personne désignée est insoupçonnable aux yeux de ce système défectueux. Je ne dis rien car je suis seul dans un monde de mépris et de jugement envers chaque être le peuplant. Je ne dis rien pour calmer le démon en moi, je ne dis rien car cela ne sert à rien. 

Je n'ai rien dit quand les gens m'insultaient.

Je n'ai rien dit quand quelqu'un avait besoin de moi.

Je n'ai rien dit quand je devais parler, je n'ai rien dit quand même mes proches avaient besoin de moi.

À quoi cela sert-il de dire quelque chose quand personne ne le prend au sérieux ni ne s'en soucie ?

Je n'ai rien dit quand un homme nous a interpellées mon amie et moi alors que nous rentrions du collège et que nous étions en jupes. Nous avons continué notre chemin. 

Je n'ai rien dit quand un élève a mis des punaises sur la chaise d'un de mes camarades. 

Randy

Je n'ai rien dit quand on m'a prise pour une idiote, insultée, traitée d'incompétente et de "sans avenir". Je n'ai rien dit quand on m'a frappée, volée, craché au visage, trahie. Je n'ai rien dit. Rien dit du tout. 

Nous n'avons rien dit quand on a cassé le vase préférée de notre mère, nous n'avons rien dit quand on a mangé tous les chocolats du calendrier de l'avant, alors, il est évident que je n'ai rien dit quand j'ai cassé son casque en m'asseyant dessus. Cela aurait été ridicule de lui avouer alors qu'il pense l'avoir fait lui même..

Je n’ai rien dit quand tu m’as fait cette blague nulle. Je n’ai rien dit quand, en cours, j'étais fatiguée mais qu'on m'a demandé d'avoir une posture droite. Je n’ai rien dit quand on ne m’a pas interrogée pour tous ceux qui ont levé la main après moi. Je n’ai rien dit quand je n’ai pas aimé le repas que celui qui m’a invitée a fait. Je n’ai rien dit quand on m’a pris ce que je voulais. Je n’ai rien dit quand on m'a demandé comment ça allait. Mais malgré tout ça on dit que je râle toujours !

Un jour, j'ai fait trois crêpes pour moi seul et suis descendu acheter du nutella. À mon retour, il n'en restait qu'une seule. J'ai demandé qui était le responsable mais n'ai pas obtenu de réponse. Je n'ai rien dit quand j'ai vu ma soeur la bouche pleine. À partir de maintenant, je lui prendrai la moitié de sa nourriture !

Gaoussou

Toute ma vie on m'a fait taire. Impossible de m'exprimer correctement, alors, j'ai arrêté. Impossible de montrer mes émotions, alors, j'ai arrêté. Je n'ai rien dit quand on m'a bousculé, quand on m'a mis une muselière, quand on m'a coupé la parole. Heureusement, aujourd'hui, cette muselière n'existe plus. 

Je n'ai rien dit quand, ce jour, dans cette petite ruelle lugubre, je me fis accoster par deux personnes, grandes , musclées et avec un air menaçant. Ils me prirent par le col et me plaquèrent au mur. Heureusement, j’étais jeune et je n’avais pas grand chose sur moi. J’avais sur moi dix euros que ma mère m’avait donnés la veille. Ils les trouvèrent, me relâchèrent et me dirent avant de partir : « dis ce qu’il s’est passé à qui que ce soit et on te retrouvera ». Alors, je n’ai rien dit et je reste avec ce secret depuis. 

Titouan

Je n’ai rien dit quand j’ai vu toutes les choses horribles qui se passent autour de moi ou dans ce monde. Je considérais que cela ne me concernait pas alors que j’aurais pu faire quelque chose. Je m'en veux à moi-même . Et quand moi j’aurais besoin d’aide, fermeront-ils les yeux et passeront-ils à autre chose ?

Parfois, mes journées se passent tellement mal que je me retrouve à être énervée. Toute cette colère, je la garde en moi, pour ne blesser personne car je m'en voudrais longtemps en pensant que j'ai exagéré la chose. Pourtant, parfois, certaines personnes dépassent les limites et, dans ces moments-là, il faudrait parler. Je n'ai rien dit quand il le fallait, même si je me sens mal de m'énerver contre quelqu'un, je regrette cependant de n'avoir rien dit en repensant à certaines situations où je me suis tue.

Je n’ai rien dit quand j’ai vu cette femme voler des couches et du lait pour bébé. Je savais qu’elle volait pour le bien de son enfant.

Sacha

Je n'ai rien dit quand on m'a demandé si ça allait, pour moi ça n'a pas d'importance, donc dire oui est devenu une habitude, sauf que cette fois je n'ai pas voulu répondre... Je n'ai rien dit non plus quand on a essayé de me blesser, car oui dans cette société et surtout dans notre génération, un homme ne doit rien laisser passer, sinon il voit tout lui tomber dessus... tout doit rester camouflé.

Je n'ai rien dit quand les mots me touchaient, ni même quand les larmes coulaient. Aujourd'hui je ne dis toujours pas quand il pleut sur mes joues.

Je n'ai rien dit quand ma sœur m'a fait rire car c'est ma sœur et c'est notre quotidien de ne pas rire aux blagues de l'autre, mais on sait au fond, que l'on se fait rire.

Je n'ai rien dit lorsque j'étais heureuse d'aller voir mes amis, et pourtant, un sourire me trahissait.

Je n'ai rien dit quand on m'a dit que j'étais "trop sensible", et pourtant mes joues rouges de rage me trahissaient aussi.

Je n'ai rien dit et pourtant je ne fais que tout raconter:  le corps nous trahit et les sentiments ne se cachent pas.

N'ayant pas rangé mes affaires dans ma chambre, je n'ai rien dit quand maman m'a demandé de le faire.

Je n'ai rien dit quand il fut un temps où j'eus vraiment besoin de l'aide de mon entourage. Je me suis tue car je pensais que mes problèmes importaient peu aux autres et qu'il aurait été inutile de partager mes ennuis avec eux par peur qu'ils le prennent à la légère et qu'ils pensent que je suis trop sensible. Je pense que ce jour là, le destin a encore frappé car ces personnes comptent beaucoup pour moi aujourd'hui, nous nous aidons mutuellement,  quotidiennement, et nous vivons de merveilleux moments ensemble.

Si je suis une feuille, les paroles qui blessent sont un stylo ; quand il me transperce, un trou se forme, déchire le papier, détruit les liens. Et même si on retire ce que l'on dit, que ce stylo s'enlève, que reste-t-il ? Un trou béant, la trace de son passage, qui ne se répare ou ne s'empire qu'avec le temps. Ce que l'on dit est dit, ce que l'on fait est fait. La seule façon de combler ce gouffre, c'est en acceptant nos torts, en comprenant nos erreurs. Heureusement pour nous, nous ne sommes pas des feuilles, nous sommes bien plus que ça, des êtres humains, dotés de compréhension, de compassion, d'empathie, d'altruisme, et de bien plus encore, ou de bien pire... Nos liens sont bien plus complexes que de simples bouts de papier déchiré. Tout ça pour dire que je n'ai rien dit quand les mots me transperçaient, quand ces paroles me blessaient, me déchiraient, car dans ce monde, le moindre signe de "faiblesse", de sentiments peut vous faire chavirer, vous faire tomber de haut, très haut. Être impassible, subir et attendre le lendemain, ne rien dire, ne rien faire en se disant qu'ils ont tort et que je ne pourrai pas changer cela, est le meilleur moyen que j'ai trouvé pour vivre. Je n'ai rien dit quand on m'insultait gratuitement, comme si ce que je suis ou ce que je porte en moi me rendait complètement différent, mais pourtant, je suis humain, comme eux, comme vous, comme nous tous. Dans ce monde où bien trop souvent l'insulte et le mépris sont communs et privilégiés, je serai vraiment libre et heureux quand je n'aurai plus rien à répondre lorsque je me poserai la question :

"Quand est-ce que je n'ai rien dit ?"

Je n'ai rien dit quand on me criait dessus quand j'étais petite,

Je n'ai rien dit quand je n'allais pas bien,

Je n'ai rien dit quand on se moquait de moi et je ne dirai toujours rien. Même pas mon nom !

Cette histoire se déroula un soir d'hiver. Ce jour-là, je ne me sentais pas bien. Pris de fatigue, je décidai d'aller me coucher et ne mis pas longtemps à m'endormir. Dans la nuit, la pluie commença à tomber de plus en plus fort, les nuages grandirent à leur tour, le vent à forcir. Un coup de tonnerre me sortit complètement du sommeil. Je vis alors, devant ma fenêtre, un homme, grand, avec une hache. Je n'osai jamais en parler. Je ne dis rien. 

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